Les frais de fonctionnement et le financement des associations – Interview avec Marianne Maillot

par | Nov 6, 2025 | Stratégie Fundraising

Le financement du fonctionnement des organisations d’intérêt général – le financement des fonctions dites transversales – la gestion de l’organisation, les ressources humaines, la direction et, éventuellement, le fundraising – est un sujet récurent de préoccupation pour les gouvernances. Dans le contexte actuel, de financements publics délétères et de pression de plus en plus forte sur les associations et les fondations pour assurer des missions autrefois dévolues à l’action publique, cette question prend une importance accrue. Nous n’avons pas une journée de formation ou un accompagnement d’une équipe associative sans que cette problématique ne soit posée.

Si certains financeurs comprennent la nécessité de financer la gestion, l’encadrement des actions, on reste encore trop souvent dans le paradoxe d’une pression toujours plus forte à l’engagement de nouveaux projets, d’une attente à l’adoption de nouvelles approches innovantes par des financeurs, publics ou privés, réticents à accepter de prendre en compte de frais de fonctionnement des organisations d’intérêt général.

Pour autant, pouvons-nous nous attendre à de saines évolutions dans ce domaine ? Nous avons voulu faire le point avec une spécialiste de l’accompagnement des stratégies de ressources des associations et des fondations, Marianne Maillot.

1- La question des frais de fonctionnement des associations revient souvent dans les articles, interviews et publications ? Pourquoi cette question fait-elle couler autant d’encre ?

A travers ce débat, on retrouve une question de première importance. Dans quelle genre de société souhaitons-nous vivre aujourd’hui et quelle type de société souhaitons-nous laisser aux générations futures au regard des grands défis que notre génération doit relever ? Actuellement, les organisations d’intérêt général travaillent dans des situations de plus en plus difficiles alors même que le nombre de leurs bénéficiaires s’accroit. Les associations et les fondations se retrouvent fragilisées alors même qu’elles contribuent largement à faire société pour une partie de la population de plus en plus importante et notamment auprès des personnes en situation de précarité.

Jusqu’à une période récente, en -dehors de certains secteurs à fort niveau d’encadrement des actions, la mentalité dominante était de diminuer le plus possibles les frais de fonctionnements. Avec des conséquences de plus en plus dommageables. Des frais de fonctionnements réduits limitent drastiquement la capacité d’innovation du monde associatif – donc sa capacité à gérer les transitions nécessaires – ainsi que la masse salariale de ces organisations avec deux conséquences : des salaires très faibles et une implication déraisonnable des salariés avec des risques élevés de burn-out.

Depuis la crise sanitaire, on assiste heureusement à une prise de conscience que les associations ne peuvent pas vivre de l’air du temps et ont besoin de financements pour garantir la qualité de leurs interventions et poursuivre leurs actions dans de bonnes conditions.

2- Existe-t’il des règles à respecter en matière de frais de fonctionnement ou est-ce finalement une question de modèle économique propre à chaque association ?

Les modèles économiques des associations sont variables d’une organisation à une autre et d’un secteur à l’autre et vont largement conditionner le montant des frais de fonctionnement nécessaire de ces organisations. La question clé est  « est ce que le montant total et réel des frais administratif peut être couvert par une ventilation sur les différents projets de l’association ou pas ? » ; si la réponse est positive …pas de problème. Si la réponse est négative, alors il est nécessaire d’interroger son modèle socio-économique.

Il est préférable de partir de la réalité propre à chaque organisation pour ventiler les frais de fonctionnement en intégrant bien l’ensemble des frais indispensables à la gestion de l’opérationnel.

Les petits dons vont plus facilement contribuer au financement du fonctionnement des organisations car ils sont majoritairement non affectés.

En dépit de la prise de conscience que nous avons mentionnée, les entreprises et les fondations – tout comme les administrations en ce qui concerne les fonds publics – rencontrent encore des difficultés à accepter d’intégrer des frais de fonctionnements aux financements octroyés aux associations et aux fondations.

Heureusement, les grands philanthropes ont une conscience plus nette des enjeux représentés par le financement de la gestion des organisations et la qualité du suivi des actions.

A cet égard, on parle de la « philanthropie de la confiance ». Les grands philanthropes octroient des dons évidemment d’un montant significatif aux associations et aux fondations en ayant confiance dans la bonne utilisation de ces fonds.

3- Au vu de l’évolution des finances publiques et des choix politiques d’une partie de nos élus, comment les associations et les fondations vont-elles pouvoir financer leurs projets et leur fonctionnement à l’avenir ? Les mécènes seront-ils d’accord pour assurer le fonctionnement des organisations d’intérêt général ? Quelles pourraient être les autres solutions ?

Clairement, le mécénat n’a jamais eu la vocation et ne pourra pas suppléer au désengagement de l’État et des collectivités territoriales.

Pour réussir à répondre aux enjeux sociaux, sociétaux et environnementaux grandissants, il est plus qu’urgent que les dirigeants des organisations de l’ESS, prennent conscience de cette situation et engagent une évolution de leurs modèles socio-économiques. C’est une question de survie pour les organisations d’intérêt général.

Elles doivent recomposer un nouveau modèle économique fondé à la fois sur des mutualisations, coopérations et collaborations, que sur des financements hybrides, subventions (quand ce sera encore possible), partenariats divers, ventes de produits et services, et, bien sûr, mécénat.

4- En guise de conclusion, quels conseils donneriez-vous aux associations et aux fondations qui recherchent des financements pour leurs salariés et leur fonctionnement interne ?

Trois dimensions clés sont à mettre en avant auprès des mécènes :

1- L’importance de la qualité des actions engagées qui nécessite un encadrement de bon niveau ce qui se traduit nécessairement par des dépenses de personnel ;

2- Le risque de travailler en mode dégradé en sous-payant le personnel de nos organisations et en ne leur offrant pas les meilleurs outils et des conditions de travail de qualité;

3- La nécessité de s’adapter en permanence à l’évolution du contexte général et des besoins des bénéficiaires en développant de nouvelles approches donc par le financement d’une fonction d’ingénierie au sein des associations et des fondations.

Par ailleurs, il est temps que les responsables et les conseils d’administrations des entreprises mécènes – tout comme les administrations publiques – assument que les organisations d’intérêt général fonctionnent comme n’importe quelle entreprise et qu’elles ont besoin elles aussi d’une infrastructure de gestion et d’un personnel de qualité.

Soyons vigilants quant aux conséquences d’un affaiblissement du tissu associatif dans notre pays qui aboutirait à une dégradation du lien social et un impact négatif dans bien d’autres domaines essentiels à la société comme la santé, l’éducation, le handicap, l’accompagnement des personnes les plus vulnérables…

Il nous reste beaucoup de travail d’acculturation à réaliser en matière de mécénat et de modèle socio-économique des organisations d’intérêt général auprès des équipes salariées et des bénévoles. Bien payer les salariés des associations et des fondations, c’est aussi recruter et conserver un personnel motivé et qualifié.

Il faut investir pour préparer l’avenir et innover !

Un grand merci à Marianne Maillot pour avoir accepté de participer à cet entretien.

Marianne Maillot est consultante en mécénat depuis 2005. Elle est très engagée auprès de l’Association Française des Fundraisers (AFF). Elle a initié la création des groupes régionaux de l’AFF et est membre de la Fundraising Academy de l’AFF.

Marianne conseille et accompagne les organisations d’intérêt général dans leur démarche de mécénat et de stratégies grands donateurs.

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